e-banking, Stratégie d’investissement
09/09/2025

Le développement des villes a été historiquement le berceau des grands changements, que ce soit l’avancée technologique ou le progrès social, politique, économique et culturel. Ce phénomène devrait s’intensifier à l’avenir. La ville de demain se dessine devant nous : plus écologique, plus flexible et accessible, automatisée, centrée sur la technologie et l’innovation, mieux surveillée, terre de vie des sièges sociaux des grandes entreprises et des services variés. Malgré des défis liés aux inégalités, la croissance continue des villes pourrait offrir de nombreuses opportunités d’investissement intéressantes.

 

La ville en transformation

Selon l’Organisation des Nations Unies, d’ici 2050, près de 2,5 milliards de personnes supplémentaires vivront en milieu urbain, portant la population urbaine mondiale à environ 68%. Ce chiffre devrait monter à 80% dans les pays les plus riches. Cette urbanisation rapide engendre des défis majeurs en matière d’infrastructures, de mobilité, de durabilité et de qualité de vie, voire d’équilibre entre les populations. Dans ce monde en constante évolution, les villes de demain se dessinent aujourd’hui à travers les prismes de la durabilité, de l’accessibilité, de l’innovation technologique et des opportunités économiques qu’elles engendrent. Alors que l’urbanisation s’accélère, les défis environnementaux et sociaux deviennent de plus en plus pressants, poussant les municipalités et les investisseurs à repenser les infrastructures, voire le mode de vie urbain. Les villes durables, intelligentes et connectées ne sont plus une utopie, mais une nécessité pour répondre aux exigences d’une population urbaine croissante.

Pour les investisseurs avisés, ces transformations représentent une myriade d’opportunités. Les technologies vertes, les systèmes de transport intelligents, les bâtiments à énergie neutre ou positive, les plateformes de connexion, les systèmes de surveillance, ou encore les infrastructures numériques, ne sont que quelques-unes des pistes prometteuses pour des investissements à la fois rentables et responsables, même si des défis se posent aussi, dans la ville de demain. 

 

La ville durable

La durabilité s’impose comme le pilier central des villes de demain, un concept qui transcende les simples considérations environnementales pour embrasser une vision holistique de l’urbanisme. Ceci est nouveau, après des siècles de croissance par simple afflux de population et développement de quartiers sans réelle maitrise de la globalité. Face à l’urgence climatique et à la raréfaction des ressources, les métropoles du monde entier sont contraintes d’adopter des stratégies ambitieuses pour réduire leur empreinte carbone et améliorer la qualité de vie de leurs habitants. Cette transition vers des villes plus durables se manifeste par une multitude d’initiatives innovantes, soutenues par des politiques publiques et des investissements privés croissants. Par exemple, l’intégration massive des énergies renouvelables dans les réseaux urbains permet non seulement de diminuer les émissions de gaz à effet de serre, mais aussi de créer des emplois locaux dans les secteurs des technologies vertes. Les parcs éoliens offshore, comme celui de Hornsea au Royaume-Uni, et les fermes solaires urbaines, telles que celles développées à Singapour, deviennent de nouvelles composantes des paysages urbains modernes.


La reconversion de bâtiments industriels désaffectés

Dans cette optique de durabilité urbaine, la réhabilitation des friches industrielles et la reconversion des bâtiments existants jouent un rôle crucial. Plutôt que de s’étendre indéfiniment, les villes doivent se reconstruire sur elles-mêmes, optimisant ainsi l’utilisation des espaces déjà urbanisés. Cette approche permet non seulement de préserver les terres naturelles et agricoles en limitant l’artificialisation des sols, mais aussi de revitaliser des zones souvent délaissées. Les friches industrielles, par exemple, représentent des opportunités uniques pour développer des projets innovants, tels que des éco-quartiers ou des espaces dédiés à l’économie circulaire, où les anciennes structures sont transformées en lieux de vie, de travail ou de culture. Cette stratégie de densification intelligente favorise également une meilleure gestion des ressources et des infrastructures, tout en encourageant la mixité sociale et fonctionnelle au cœur des villes. 

 

Vers une ville à zéro émission

Les bâtiments à énergie positive, qui produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment grâce à des panneaux solaires intégrés et des systèmes de gestion intelligente de l’énergie, sont un autre exemple de cette tendance. Des villes comme Copenhague et Stockholm se sont fixées des objectifs ambitieux pour devenir neutres en carbone d’ici 2025 et 2040 respectivement, en partie grâce à la construction de tels bâtiments. En Suisse, Genève a entrepris une refonte ambitieuse de ses réseaux thermiques : au lieu d’avoir une chaudière dans chaque bâtiment de la ville, la chaleur sera produite dans une centrale et envoyée aux bâtiments via des canalisations souterraines. L’énergie sera issue de l’incinération des déchets, du gaz naturel, des pompes à chaleur qui puisent l’eau du lac Léman pour alimenter le réseau en chaleur. L’eau profonde du lac Léman sera également utilisée pour rafraîchir les bâtiments. Avec ce déploiement, Genève entend accélérer la transition énergétique et réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 60% d’ici 2030. Ces initiatives sont soutenues par des cadres réglementaires stricts et des incitations fiscales, créant un environnement favorable aux investissements dans l’immobilier durable.

 

Une ville verte sans déchets

La création d’espaces verts urbains et la promotion de la mobilité douce sont également des éléments clés pour améliorer la qualité de l’air et la santé publique. Les espaces verts ont un impact significatif sur la température urbaine en agissant comme des « îlots de fraîcheur ». Ils réduisent la température moyenne de la ville d’environ 2°C et peuvent même créer des différences de 10°C ou plus entre une rue et un espace verdoyant pendant une canicule. Ce rafraîchissement est dû à l’ombre des arbres, l’absence de bitume (qui emmagasine la chaleur en journée) et à l’évapotranspiration, qui refroidit l’air ambiant.

Les villes investissent aussi dans des infrastructures cyclables, des zones piétonnes élargies et des transports en commun plus efficaces et moins polluants. Les systèmes de gestion intelligente des déchets et de l’eau sont un autre domaine où les villes durables innovent. Des technologies avancées deviennent de plus en plus courantes, telles que les capteurs IoT (Internet des objets) pour surveiller les niveaux de déchets et optimiser les routes de collecte, ou les systèmes de récupération des eaux de pluie pour l’irrigation des espaces verts. Ces solutions permettent non seulement de réduire les coûts opérationnels, mais aussi d’améliorer l’efficacité et la durabilité des services urbains.

Les villes durables deviennent ainsi des écosystèmes propices à l’innovation, attirant talents et capitaux dans un cercle vertueux de croissance responsable.

 

Une ville aux disparités économiques importantes mais source d’opportunités

La proximité d’universités, de centres de recherche ou de grands groupes de plus en plus puissants grâce à la globalisation, rend les capitales plus attractives que n’importe quelle autre ville pour les populations qualifiées. À l’inverse, des populations moins qualifiées en quête d’emplois de services quittent les villes moyennes, les campagnes ou les pays pauvres, pour s’installer de manière précaire dans les capitales ou leurs proches banlieues. Enfin, la hausse massive des prix de l’immobilier chasse certaines familles des classes moyennes (100 000 habitants en moins à Paris depuis 2010 par exemple). La grande ville crée des emplois qualifiés et des emplois de services, elle regroupe ainsi une population très aisée et une population précaire, tout en se vidant de sa classe moyenne.

Que se passera-t-il d’ici 10 ans ? Les centres villes devraient connaitre une nouvelle hausse des prix immobiliers, qui devraient encore chasser des familles et des classes populaires, et attirer une population aisée et une population prête à accepter un logement modeste pour un emploi. Des modèles de vie modernes, tels que le télétravail et les espaces de coworking, pourraient cependant offrir aux jeunes générations une chance de revenir vers des centres urbains dynamiques. On devrait ainsi voir un accroissement encore plus marqué des inégalités en ville. Ceci renforcera le besoin de sécurité, mais aussi l’émergence d’une culture internationale. Les prestataires de services traditionnellement d’autres pays trouveront une manne dans cette population qualifiée et globalisée. La ville sera le centre d’explosion des technologies et du progrès, stimulés par l’IA. Mais elle pourrait être encore davantage un entrelacement de cultures variées, à la fois source de richesse et de tensions, qui parviennent in fine à cohabiter et à faire prospérer une métropole plus durable, plus high-tech, plus connectée et plus agréable à vivre. 

 

La technologie, au cœur des enjeux de la ville de demain

Dans un monde en constante évolution, les villes de demain affrontent le défi de fusionner les innovations technologiques avec le développement urbain pour créer des environnements résilients, durables et intelligents, où la qualité de vie est rehaussée par l’intégration homogène de systèmes intelligents et connectés. Singapour, leader dans ce domaine, utilise un réseau dense de capteurs loT pour surveiller divers aspects de la vie urbaine, tels que la qualité de l’air et le volume de trafic. Ce réseau permet d’optimiser l’utilisation des ressources et d’améliorer la mobilité urbaine en temps réel. Dubaï, pour sa part, investit massivement dans l’impression 3D, avec un ambitieux projet de construire 25% de ses nouveaux bâtiments d’ici 2030 via cette technologie, afin d’optimiser au maximum les ressources utilisées.

L’intégration des véhicules autonomes continue de progresser dans plusieurs métropoles américaines, notamment à San Francisco et Phoenix, permettant de pallier la densification du trafic automobile d’une part et du manque de chauffeurs d’autre part. Londres expérimente des systèmes d’éclairage public adaptatifs qui s’ajustent en fonction de la fréquentation des zones, réduisant ainsi la consommation énergétique nocturne. Les transports aériens autonomes prennent forme, comme à Paris où des projets de drones taxis sont à l’étude pour offrir des trajets rapides et écologiquement durables entre les principaux pôles urbains. De nombreuses villes comptent également utiliser ces derniers afin de fluidifier le transport de marchandises et notamment la livraison à domicile, dans un objectif de réduction de la congestion.

Enfin, les technologies de réalité augmentée et virtuelle s’implantent également dans l’urbanisme pour favoriser la collaboration entre designers, architectes et développeurs, facilitant ainsi la planification des projets immobiliers. Les « jumeaux » ou « clones » numériques en sont un exemple : ils permettent à la fois de prévoir une meilleure urbanisation en amont de la construction comme de gérer l’ensemble de l’écosystème de manière virtuelle, une fois les projets immobiliers finalisés. Enfin, les « forêts urbaines » verticales qui s’épanouissent dans de nombreuses villes asiatiques, mais également occidentales telles que Milan, démontrent comment l’intégration de capteurs peut assurer la santé de la végétation tout en contribuant à réduire le dioxyde de carbone en milieu urbain.

 

Comment s’exposer à la montée en puissance de la technologie au sein des villes ?

L’Internet des Objets est au cœur de cette transformation, permettant un monitoring efficace et la gestion intelligente des infrastructures urbaines, grâce à une multitude de capteurs interconnectés. L’intelligence artificielle (IA), fer de lance des technologies intelligentes intégrées aux villes de demain, joue un rôle crucial en optimisant les systèmes autonomes et en offrant des capacités d’analyse prédictive qui facilitent la prise de décision éclairée. La connectivité (5G et prochainement 6G) améliore la communication entre dispositifs intelligents, accélérant la mise en œuvre de solutions de mobilité et de gestion des ressources. L’impression 3D représente une révolution dans le secteur de la construction, permettant de bâtir plus rapidement tout en réduisant les déchets. Les technologies de réalité augmentée et virtuelle (AR/VR) optimisent la planification et la visualisation des projets urbains, facilitant ainsi les collaborations entre les différents acteurs du développement immobilier. Enfin, l’essor de la technologie des drones ouvre de nouvelles voies pour le transport aérien autonome, offrant des solutions logistiques qui pourraient réduire la congestion routière. Les semi-conducteurs, omniprésents dans les dispositifs technologiques, resteront la colonne vertébrale de toutes ces innovations et le meilleur moyen d’être exposé financièrement.

 

Comment s’exposer aux défis d’infrastructures de la ville de demain ?

Les villes durables favorisent l’émergence de nouvelles formes de collaboration entre les secteurs public et privé. Les partenariats public-privé (PPP) deviennent un outil essentiel. Ces collaborations permettent de partager les risques et les bénéfices, tout en accélérant la mise en œuvre de solutions innovantes. Par exemple, des entreprises privées peuvent investir dans des technologies de pointe pour la gestion de l’énergie ou des déchets, tandis que les municipalités fournissent les infrastructures et les cadres réglementaires nécessaires, tout en assurant une visibilité de cash flow aux entreprises sur une période longue.

La durabilité urbaine représente ainsi pour les investisseurs une opportunité sans précédent de participer à la construction de villes plus résilientes et prospères. En soutenant des projets qui intègrent des pratiques durables, les investisseurs peuvent non seulement contribuer à la lutte contre le changement climatique, mais aussi bénéficier de rendements attractifs dans des marchés en pleine croissance. Les villes de demain, durables et innovantes, offrent ainsi un terrain fertile pour des investissements à la fois rentables et responsables.

En conclusion, les villes de demain se profilent à l’horizon comme des entités dynamiques et durables, façonnées par l’innovation technologique et une vision résolument tournée vers la durabilité. Ce qui n’empêche pas une cohabitation entre « très aisés » et « très aidés ». Les défis posés par l’urbanisation croissante et le changement climatique, notamment le besoin de sécurité, ouvrent la voie à des opportunités d’investissement sans précédent, où performance financière et responsabilité environnementale vont de pair. Les investisseurs ont un rôle crucial à jouer dans cette transformation, en soutenant des projets qui non seulement génèrent des rendements attractifs, mais contribuent également à bâtir un avenir plus durable.


Eric de Tessières
Group Chief Sustainability Officer


Nadjat Hamrouni
Director Sustainable Investment Solutions


Anthony Toupin
Senior analyst Global Investment Research